Loi de 1965 sur la protection de la Jeunesse

Publié le par Fouad Lahssaini

 

Depuis quelques mois, le débat autour d’une réforme de la loi de 1965, relative à la protection de la jeunesse, bat son plein…entre spécialistes. Ce qui est regrettable car le sujet est des plus sensibles tant au niveau philosophique et de choix de société, qu’au niveau technique.

En fait, ce débat a été suscité par l’annonce d’un ’avant-projet du ministre de la justice, « portant réponse au comportement délinquant de mineurs » ! Déjà , le titre annonce la rupture avec la logique qui a présidé jusque-là, à toutes les réformes portées à la justice des mineurs.

Par ailleurs, la réforme de la loi de 65 est une question débattue depuis une vingtaine d’années et différents courants existent en la matière et c’est pourquoi, il est important, afin de bien cerner la réforme proposé de revenir tant sur la loi en vigueur que sur celle qui l’avaient précédée.

Quelles étaient ces réformes

Le modèle de 1912, sur la protection de l’enfance. Jusque-là, le Code pénal était également appliqué aux mineurs comme aux majeurs avec comme exception que les plus jeunes bénéficiaient d’une réduction de peine automatique. Mais, la question du « discernement » se posait dans deux sens opposés. D’une part, les enfants qui manquent de cette faculté leur permettant de mesurer le sens de la peine. Pour ceux-là, le législateur avaient prévu des « mesures qui ne sont pas des peines », mais dont la conséquence pouvait se traduire par des placements- détentions, qui pouvaient se prolonger jusqu’à la majorité civile de la personne, même si le délit est minime et l’âge de l’enfant très jeune.

D’autre part, à l’autre bout de la chaîne le problème se posait pour les enfants qui semblent avoir agit avec ce fameux discernement et qui « profitent » alors des « largesses » de la loi à cause de la diminution de la peine dont ils bénéficient automatiquement. Pour ce dernier, la condamnation se prolongeait par une mesure d’internement jusqu’à la majorité civile.

En 1912, l’enfant bénéficie de régime où le problème de discernement est évacué par l’instauration d’un modèle dit protectionnel, mais centré sur le mineur ayant commis un fait qualifié infraction. Et, c’est un juge des enfants qui prononcera alors, des « mesure de garde, d’éducation ou de préservation ».

Le côté court de cette avancée est que ce régime prévoyait aussi des mesure encore plus dures que le précédent, allant jusqu’à condamner le mineur, dans les cas les plus graves, à la détention jusqu’à l’âge de 41 ans !. En d’autres termes, si l’on admet que l’enfant peut souffrir de manquement que la société se doit de combler, cette dernière se protège des « classes dangereuses » et pour longtemps.

 

Vient en suite, la Loi de 1965, relatif à la protection de la jeunesse. Ce modèle se distingue du précédent par le fait qu’il étende la notion de protection- contrôle à tous les mineurs « dont la santé, la sécurité ou la moralité sont mises en danger, soit en raison du milieu où ils sont élevés, soit par les activités auxquelles ils se livrent, ou dont les conditions d’éducation sont compromises par le comportement des personnes qui en ont la garde » (art. 36, 2°).

Ce qui introduit la notion de mineur en danger, partant de l’hypothèse qu’il est difficile de distinguer le délinquant du « pré- délinquant » et qu’il est prioritaire de mettre en place des remèdes afin de prévenir le passage à l’acte. la différence est de taille, car, dorénavant, il s’agit de penser le justice des mineurs en termes de besoins nécessaires pour permettre à l’enfant d’accéder à une certaine émancipation, mais surtout, cela marque l’engagement de la société pour y parvenir. Le revers de la médaille et la principale critique du modèle, c’est que c’est d’abord l’extension du contrôle social et moins une baisse de la judiciarisation qui le caractérise.

 

C’est précisément d’une « déjudiciarisation » que l’on a parlé lorsque la protection de la jeunesse a été transférée aux communautés et qui s’est concrétisée par les décrets de 1985 en flandre et 1991 en Communauté française.

Depuis lors, la « politique de protection de la jeunesse » s’est davantage rapprochée de la politique de jeunesse et s’inscrit dans une logique de prévention générale où l’intervention auprès des mineurs se passe dans le milieu de vie, le quartier,…donnant à la justice un rôle de dernier recours.

 

Aujourd’hui, parler d’une réforme de la loi de 65, par une loi « portant réponse au comportement délinquant de mineurs », fait nécessairement penser à un retour à la pénalisation de la justice des mineurs. En effet, le contexte et la logique sécuritaire qui caractérise les politiques menées pour faire face aux « violences des jeunes » et les différents antécédents du ministre de la justice en termes de projets nous incitent à la vigilance. D’autant plus que, le dit avant-projet abondonne la logique protectionnel pour adopter un système basé essentiellment sur des mesures sanctionnelles. Il en découle que l’objet devient la protection de la société et non pas du mineur. Annonce des mesures sanctionnelles aussi par rapport aux parents et utilise, encore plus, la « psychiatrisation » et le traitement en santé mentale tant du mineur que da sa famille.

A suivre.

 

Fouad Lahssaini

Député de Bruxelles-Capitale

Membre du parlement de la Communauté française

Novembre 2001

 


 

 

Publié dans jeunesse

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